L’indépendance professionnelle des MK salariés vis à vis de leur employeur repose sur plusieurs textes.
Article R. 4321-56 : Le masseur-kinésithérapeute ne peut aliéner son indépendance professionnelle sous quelque forme que ce soit
Article R. 4321-136 : Le fait pour le masseur-kinésithérapeute d’être lié dans son exercice professionnel par un contrat ou un statut à une administration, une collectivité ou tout autre organisme public ou privé n’enlève rien à ses devoirs professionnels et en particulier à ses obligations concernant le secret professionnel et l’indépendance de ses décisions. En aucune circonstance, le masseur-kinésithérapeute ne doit accepter de limitation à son indépendance dans son exercice professionnel de la part de son employeur. Il doit toujours agir, en priorité dans l’intérêt des personnes, de leur sécurité et de la santé publique au sein des entreprises ou des collectivités où il exerce.
Article R. 4321-59 : Dans les limites fixées par la loi, le masseur-kinésithérapeute est libre de ses actes qui sont ceux qu’il estime les plus appropriés en la circonstance. Sans négliger son devoir d’accompagnement moral, il limite ses actes à ce qui est nécessaire à la qualité, à la sécurité et à l’efficacité des soins
Article R. 4321-80 : Dès lors qu’il a accepté de répondre à une demande, le masseur-kinésithérapeute s’engage personnellement à assurer au patient des soins consciencieux, attentifs et fondés sur les données acquises de la science.
Nous tenons à rappeler que le MK est libre du choix des techniques qu’il choisit de mettre en œuvre.
S’il estime qu’une prescription n’est pas adaptée au regard de son évaluation par son BDK, il est en droit de demander rectification au prescripteur (R4321- 2 du CSP : « Dans le cadre de la prescription médicale, il établit un bilan qui comprend le diagnostic kinésithérapique et les objectifs de soins, ainsi que le choix des actes et des techniques qui lui paraissent les plus appropriés. Ce bilan est tenu à la disposition du médecin prescripteur. Le traitement mis en œuvre en fonction du bilan kinésithérapique est retracé dans une fiche de synthèse qui est tenue à la disposition du médecin prescripteur.[ …]
Elle est également adressée au médecin prescripteur lorsqu’il est nécessaire de modifier le traitement initialement prévu ou lorsque apparaît une complication pendant le déroulement du traitement. »
Il est en droit de refuser une prise en charge qu’il juge médicalement inadaptée, délétère, comportant des techniques non conformes aux données acquises de la science, et doit alors échanger avec le prescripteur, son collègue.
Cela est aussi vrai si l’établissement fonctionne sur la base de la NGAP (établissement à activité de type libéral ou employeur MK libéral, avec cotations et facturations selon NGAP) puisque la prescription s’impose alors (introduction au titre XIV de la NGAP) . Le MK se plie a la prescription, ou la refuse en opposant son BDK, et propose une modification du traitement initial prévu au médecin prescripteur. L’échange est de rigueur. La plupart de prescripteurs sont ouverts, ont cru bien prescrire, ou ont une raison tout à fait recevable.
Multiplication des prises en charge et surcharge :
Il arrive de voir des MK salariés soumis à une pression administrative ou médicale de prise en charge maximale de patients, quel que soit le type d’établissement public ou privé.
Cette pression peut se manifester par une demande hiérarchique ou médicale de multiplier des prises en charge en terme de fréquence journalière ou hebdomadaire ( 2 a 3 par jour, par exemple en SSR) Là encore, le MK jugeant ces séances inutiles peut être amené à justifier son refus par un BDK pointu, et une argumentation soignée et respectueuse.
On voit aussi certaines structures demander à leurs salariés MK de prendre en charge un nombre exagéré de patients de façon simultanée, ou sur la journée. Une journée de 7 heures de travail ne peut permettre de prendre en charge plus de 18 à 20 patients puisque le traçage dans le dossier médical reste une obligation médico-légale et que l’acte de bilan/évaluation est un acte/temps réel qui se rajoute, sur des prises en charge initiales, ou de façon régulière.
En effet, la qualité des soins mais aussi la sécurité de patients sont en jeu. Des prises en charge simultanées peuvent comporter une mise en danger par manque de présence, de vigilance, d’autant que le patient présente pour le moins des déficits physiques, mais parfois aussi des déficiences psychiques.
Pour rappel, pour les établissement soumis à la NGAP ( cabinets libéraux employant des MK salariés, structures spécifiques de soins) la prise en charge de plus de 3 patients de façon simultanée est interdite (NGAP, titre XIV, chapitre 3) Dans le cas de 3 patients maximum, en traitement de groupe homogène, traitements multiples en groupe, la durée totale de la séance est de l’ordre de 1h30, et pour les traitement conduits en parallèle, la prise en charge minimale de chaque patient est de l’ordre de 30 mn (continu ou fractionné)Tout autre traitement de plus de 3 patients n’est plus remboursable, sortant de la NGAP, et peut être considéré alors comme une gymnastique de groupe relevant de l’APA. Ce type de gymnastique très intéressant peut bien sûr être pratiqué par un MK ayant sa carte d’éducateur sportif, mais ne relève pas des assurances sociales.
Une démarche obligeant un MK salarié dans ce cas à recevoir 4 à 5 patients ensemble, pris en charge par les assurances sociales, relèverait de l’infraction au code de la sécurité sociale, et serait assimilable a une démarche commerciale ( Article R. 4321-67 : La masso-kinésithérapie ne doit pas être pratiquée comme un commerce.)
Pratiques de taches ne relevant pas de la kinésithérapie :
Bien évidemment la fiche de poste ou la description contractuelle du poste et de la mission s’imposent.
Restez cependant ouvert, il n’y a pas de sottes taches au service du patient. Faites au mieux, en votre âme et conscience, évitez les situations à risque, et rappeler à votre hiérarchie qu’il est ballot de payer un MK pour assister des toilettes, ou pour sortir les poubelles, et que le temps passé à autre choses se fait au détriment des soins kinés.
Bref, consœurs et confrères salariés, restez Indépendant et Professionnel, et privilégiez l’échange avec les prescripteurs ou votre hiérarchie, sur des bases de bon sens, de raison, mais aussi des bases réglementaires et légales si vous vous sentez en difficulté. Le patient est le centre du débat. La qualité, la sécurité et la pertinence des soins s’imposent. La réglementation aussi.
N’oubliez pas que le médecin est votre collègue et non votre chef, parfois coordonnateur des soins et qu’aucune hiérarchie ne peut aliéner votre indépendance.
N’hésitez pas à contacter votre Ordre départemental, par courriel, afin de bien formaliser vos doléances et contraintes ressenties. Une simple mise à plat permet souvent de relativiser les choses. Nous pouvons vous aider.