8 novembre : collaboration entre MK D.E. et ostéopathes non-professionnels de santé

Face au constat que de nombreux MK semblent envoyer des patients chez un ostéopathe Non Professionnel de Santé (NPS), et donc à l’apparente ignorance des compétences et champs d’intervention des ostéopathes, ainsi que des nuances entre ostéopathes professionnels de santé et ostéopathes NPS, il convient de rappeler quelques éléments légaux.
En préambule, il faut préciser qu’il est ici question de légalité, de conformité au code de déontologie, et de protection du patient. L’habileté, l’expertise du praticien ostéopathe, n’est pas en cause.

Ostéopathe, définition légale :

Le titre d’ostéopathe (créé par le décret 2007-435) est clair sur ce que peut faire un ostéopathe : « Les praticiens justifiant d’un titre d’ostéopathe sont autorisés à pratiquer des manipulations ayant pour seul but de prévenir ou de remédier à des troubles fonctionnels du corps humain, à l’exclusion des pathologies organiques qui nécessitent une intervention thérapeutique, médicale, chirurgicale, médicamenteuse ou par agents physiques. Ces manipulations sont musculo-squelettiques et myo-fasciales, exclusivement manuelles et externes. Ils ne peuvent agir lorsqu’il existe des symptômes justifiant des examens paracliniques. »
Pour faire simple, un ostéopathe n’a pas le droit légal d’intervenir pour des troubles qui sont conséquences d’une pathologie organique, c’est-à-dire d’une pathologie ayant une ou des lésions anatomiques reconnues pouvant en rendre compte.

Nous rappellerons aussi pour la clarté du propos qu’un organe n’est pas une glande, mais une structure anatomique constituée de différents tissus en vue d’une fonction déterminée : la main est ainsi un des organes de la préhension, les membres inférieurs sont des organes de la locomotion.

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Masseur-kinésithérapeute, définition légale :


La loi 2016-41 a revu la définition de  la profession, notamment en précisant, dans l’article L4321-1 que le MK exécute des actes médicaux sur prescription d’un médecin, reprenant ainsi la terminologie légale de l’«Arrêté du 6 janvier 1962 fixant liste des actes médicaux […] pouvant être pratiqués également par des auxiliaires médicaux… » : les MK lorsqu’ils exercent dans un but thérapeutique, donc sur prescription médicale, font des actes médicaux.

En conséquence :

Il apparait donc logiquement qu’un patient ayant consulté son médecin

  • pour une pathologie organique, conséquence d’une lésion tissulaire (par exemple entorse, élongation, arthrose, déchirure, arthrite, neuropathie, fracture, etc.)
  • qui lui a prescrit des antalgiques et/ou des AINS (donc une intervention médicamenteuse)
  • qui lui a prescrit des séances de kinésithérapie (donc une intervention par traitement médical)

ne peut pas bénéficier de soins par un ostéopathe, conformément au décret 2007-435 ci-dessus cité.

Donc :

Un masseur-kinésithérapeute ayant en soin un patient qui a un traitement médicamenteux pour une pathologie donnée, et donc des soins de kinésithérapie et rééducation, ne devrait pas adresser ce patient à un ostéopathe, pour la pathologie et les conséquences de cette pathologie qu’il prend en charge …

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Pourquoi ?

Envoyer un tel patient vers un ostéopathe pourrait etre assimilé à une complicité d’un exercice illégal de la médecine si l’ostéopathe le prend en charge, puisqu’il n’en a pas le droit (ou de la kinésithérapie si on considère un kinésithérapeute intervenant en urgence sans prescription médicale).  

De plus, les ostéopathes NPS ne sont soumis à aucun code de déontologie et peuvent pratiquer des techniques qui ne sont pas reconnue conformes aux données actuelles de la science (ostéopathie viscérale, crânienne, voire autres pratiques dérivantes). En envoyant un patient vers un praticien qui pourrait utiliser ces techniques, le MK se mettrait en infraction avec l’art. R. 4321-87 de notre code de déontologie « Le masseur-kinésithérapeute ne peut conseiller et proposer au patient ou à son entourage, comme étant salutaire ou sans danger, un produit ou un procédé, illusoire ou insuffisamment éprouvé. »

Il est bon de savoir que les ostéopathes sont des professionnels ayant obligation de RCP. Mais sur un plan assurantiel, leur RCP peut refuser d’intervenir s’il s’avjusticeère que l’acte n’était pas légalement autorisé (lésion organique).

De plus, la notion d’aléa thérapeutique n’a pas cours pour des non-professionnels de santé : en cas d’acte d’ostéopathie bien indiqué, bien exécuté, par un ostéopathe NPS expérimenté,  mais se terminant mal pour le patient (accident neurologique par exemple) il n’y a pas de possibilité d’indemnisation du patient au titre des accidents médicaux, et le patient se retrouverait sans aucune indemnisation. Et à plus forte raison si l’acte n’était pas légal.

Il serait alors possible que certains patients, « bien conseillés », se retourneront contre vous, professionnel de santé qui l’avez envoyé vers ce praticien. Le patient « victime » invoquera votre conseil de consultation comme caution, pensant donc avoir affaire à un professionnel de santé (qui justement exerce dans la même MSP parfois), car il ignorait les nuances entre un professionnel de santé et un NPS… Comme de nombreux autres professionnels de santé, du reste.

Quoi faire ?

Plusieurs solutions, si techniquement vous êtes en panne, vous pouvez :

  • renvoyer chez une consœur ou confrère maîtrisant d’autres techniques de kinésithérapie manuelle (Sohier, thérapie manuelle, Jones, Maitland, etc.)
  • renvoyer chez un MK ostéopathe, qui pourra poursuivre les soins sur quelques séances, et en toute compétence exécuter de façon complémentaire une ou deux techniques manipulatives telles que les MK sont en droit de le faire (avis CNO des 17 et 18 décembre 2014) sans toutefois faire une séance d’ostéopathie car il est soumis aux mêmes règles, même en ayant des compétences d’intervention élargies.
  • réadresser au médecin traitant en expliquant que vous ne pouvez plus faire progresser le patient

 

Il est important que les MK prennent conscience des limites et du risque à envoyer un patient venu faire des soins médicaux vers un Non Professionnel de Santé non soumis à une déontologie, même si ce praticien semble excellent, réputé, expérimenté, et compétent.